Une fois, la personne dont nous parlerons a dit : « Je suis une enseignante qui chante » et c’était vrai, car avec ses chansons elle a transmis des connaissances positives à plusieurs générations de Cubains durant le demi-siècle qu’a duré sa vie artistique avec un style de jongleuse.
Personne ne peut nier qu’avec des chansons comme Mi gatico Vinagrito (Mon petit chat Vinagrito), Vicaria, El zunzuncito (L’oiseau mouche), Tía jutía (Tante ajoutie) ou Señora manatí (Madame Lamantin), elle transmettait à ceux qui l’écoutaient l’amour envers les animaux, aussi bien domestiques que sauvages.
Mais Teresita Fernández, plus que prêcher cet amour, le pratiquait dans tous les moments de sa vie. Chaque jour elle plaçait sur le rebord de sa fenêtre un récipient avec du riz pour les moineaux, après quoi elle les appelait avec des sifflements très particuliers et ils venaient rapidement se régaler de cette nourriture. Elle ne s’en est jamais approchée, elle n’a essayé ni de les toucher ni de les domestiquer… « Les petits oiseaux doivent vivre en liberté » disait-elle.
Parmi ses nombreuses qualités se trouvait un désintéressement proverbial pour les biens matériels ; sa maison était meublée et décorée d’une façon simple, sans télé et sans autres électroménagers sauf un magnétophone-radio qu’on lui avait offert et les diplômes des nombreuses distinctions qui lui avaient été remises pendaient des murs.
Sur un buffet elle conservait ses trésors les plus précieux : une image de Jésus-Christ à côté d’un buste de José Martí et un portrait d’Ada Elba Pérez, et dans un coin de la salle de séjour se trouvait la vielle cuvette émaillée dont elle s’est inspirée pour composer la chanson Lo feo (Ce qui est laid), cuvette utilisée comme pot pour des plantes.
L’interviewer a été toute une aventure, il a fallu d’abord faire un parcours dans son petit appartement et écouter chacun des détails sur chaque chose qu’elle montrait. Après, s’asseoir dans la salle de séjour, et elle, dans son rockingchair avec son cigare fumé à moitié entre ses doigts, raconter des aspects intéressants de sa vie.
Teresita Fernández était née le 20 décembre 1930 à Santa Clara, capitale de la province de Las Villas, dans le centre de notre pays, l’actuelle Villa Clara et décédée à La Havane, le 11 novembre 2013. Dès qu’elle avait quatre ans elle est entrée dans le monde de l’art car elle chantait à la radio et elle a écrit ses premières chansons dans les années 50, toujours inspirées de son expérience personnelle.
Elle a été formée comme enseignante à l’École Normale de sa ville natale, centre où, plus tard, elle a donné des cours et en 1959 elle a eu le diplôme de Docteur en Pédagogie.
En 1958 elle s’est rendue à La Havane où elle s’est consacrée à composer et à chanter des chansons style jongleuse.
Elle a non seulement composé des chansons pour enfants, certaines de ses chansons les plus sentimentales sont faites pour des adultes comme cela est le cas de Tanto como te amé (Je t’ai tant aimé), Cuando el sol (Quand le soleil) et Cuídame tú (Protège moi, toi), cette dernière marquée par un sentiment religieux profond quoiqu’étant une chanson d’amour.
De fait, dans ses débuts comme professionnelle de l’art elle a travaillé pour les adultes. Ce sont les Hermanas Martí (Les sœurs Martí) qui ont déblayé le chemin pour sa première présentation à La Havane, le 20 juillet 1965, dans la salle Arlequín, présentation à laquelle ont assisté Sindo Garay et Ignacio Villa (Bola de Nieve).
Quelques mois après, elle a commencé à se présenter aux côtés de Bola au restaurant Monseigneur, au Vedado, dans un espace connu à l’époque sous le nom de Chez Bola. Après elle a eu son propre espace au petit club Coctel au coin des rues 23 et N, toujours au Vedado.
Dans la radio, elle a animé les programmes Musa traviesa (Muse espiègle) et De regreso (De retour), et elle s’est présentée pour la première fois à la télé en 1960, dans l’inauguration du programme La casita de azúcar (La petite maison en sucre).
Elle a fondé l’espace de jongleurs la Peña de los Juglares au parc Lénine où elle a côtoyé de prestigieuses personnalités de la culture nationale et internationale et elle s’est produite sur plusieurs scènes à l’étranger y compris dans le cadre des Journées Darianas, au Nicaragua, et au Second Festival Ibéro-américain de Narration Orale et Scénique de Monterrey, au Mexique, dans lequel elle a eu le Prix Chamán.
Il est peu probable qu’un Cubain, même ceux qui, comme moi, ont déjà des cheveux blancs, n’ait pas été bercé dans son enfance par la voix de Teresita ou n’éprouve pas de l’admiration pour elle, pas seulement pour son art mais aussi par sa modestie proverbiale, sa douceur et son courage. C’est pourquoi elle continuera à vivre pour toujours dans le cœur de Cuba.
Traduit par: Reynaldo Henquen Quirch
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