Depuis les « areítos » (1), nos aborigènes ont jeté les bases d'une culture diverse. Ces rites avaient déjà des paroles chantées et, au-delà des objectifs magiques et religieux, les inspirations et les talents sont allés se profilant dans cet archipel baptisé bientôt du nom de Cuba.
À partir de l'arrivée des Espagnols, la musique ecclésiastique l'a emporté, aux côtés de celle des Canaries, de l'Andalousie et de Castille, mais vers le XVIe siècle, la sueur et les rythmes des esclaves s'y sont insérés pour toujours dans l'idiosyncrasie cubaine. Depuis lors les sonorités des tambours, des hochets et les chants africains ont été toujours présentes et à leurs côtés, les expressions sensuelles qu'elles provoquaient.
Depuis lors, une des légendes les plus évoquées a été celle d'Oshún (2). L'on raconte qu'elle fait des miracles et qu'on lui attribue la coquetterie féminine. De plus, nombreux sont ceux qui l'appellent la Vénus du panthéon Yoruba. À travers les ans, les chansons qui lui ont été dédiées l'ont montrée comme ça : divinité des sortilèges d'amour, prodigue par sa bonté pour donner des richesses matérielles, symbole de la fertilité...De plus, dans la santería (3) elle s'assimile à la Vierge de la Charité del Cobre, la Patronne de Cuba.
D'autre part, au XVIIIe siècle déjà, la zarzuela (opérette espagnole) brillait aussi sur les scènes cubaines comme un reflet de thèmes mythologiques et légendaires. Dans l'œuvre “Cecilia Valdés”, l'un des exposants les plus célèbres de ce genre à Cuba, la caractérisation du personnage principal est basée sur l'histoire populaire de l'enlèvement d'une fille par le diable, fille à laquelle fait référence Villaverde dans son texte.
Selon les chercheuses Catalina Hernández et Mar Ortega, Cecilia devient une version cubanisée de Chaperon Rouge ce qui est mis en évidence dans le récit que Chepilla raconte à Cecilia pour empêcher qu'un homme de sa connaissance ou qu'un homme inconnu lui fasse du mal.
Sans aucun doute, l'auteur s'est basé sur les légendes qui, à travers l'histoire, ont entouré les femmes et qui ont des expressions très fréquentes notamment dans l'art et dans les traditions populaires, raison pour laquelle il l'a caractérisée comme une femme d'une beauté légendaire:
« La bouche fine et les lèvres charnues, traduisant plus de volupté que fermeté de caractère, les joues pleines et rondes et une fossette au menton, formaient un bel ensemble, qui, pour être parfait, n'avait besoin que d'une expression moins malicieuse voire maléfique. Tout est passion et feu ».
Cependant, ce mythe de femme métisse voluptueuse et sensuelle n'est pas complètement en accord avec celui de la mulâtre selon Jean Lamore : « Une femme ardente et sensuelle, à la fois femme facile et femme fatale... »
Ces thématiques continueront à guider nos créations musicales tant dans la rumba qui, selon ce que l'on raconte, est originaire des banlieues de La Havane et de Matanzas, comme cela est le cas du son, né dans les recoins des montagnes de la Sierra Maestra. C'est ce qui arriverait après dans les danzones, les guarachas, la salsa, le boléro...
Un exemple récent en est le videoclip d'Eme Alfonso intitulé “Oroko”, en l'honneur du père d'Orunmila, qui, selon ce que l'on raconte, est venu au monde pour la première fois pour superviser des questions concernant les grossesses, las naissances, les maladies, l'utilisation des herbes et la disposition générale des choses.
Beaucoup de personnages de légendes ou construits à partir d'elles, ont servi d'inspiration à la musique cubaine, depuis les areítos jusqu'à nos jours.
Notes
1.- Danse que les habitants aborigènes des Grandes Antilles accompagnaient de chants durant leurs fêtes et rites religieux.
2.- Oshun, Oxum (dans le candomblé brésilien), Ochun (dans la santeria) est l'orisha des eaux des rivières. Elle est la déesse de la beauté et elle a une forte liaison avec le monde spirituel. Elle est représentée par le jaune.
3.- La Santería (Lukumi, Regla Lucumi ou regla de Ocha) est une religion originaire des Caraïbes dérivée de la religion yoruba pratiquée à Cuba, en Colombie et au Venezuela.
Pour échapper à la persécution de leurs maîtres qui voulaient les convertir au christianisme, les esclaves ont habilement mêlés dans leurs cérémonies leurs esprits aux saints catholiques. Grâce à la santeria ils purent sauvegarder également leurs danses, leurs rythmes, leurs chants et, pendant longtemps leurs langues ou leurs dialectes.
Traduit par: Reynaldo Henquen Quirch
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